jeudi 6 août 2009

Héritage Montréal exprime des réserves importantes Suspension de l’adoption du projet

Héritage Montréal y est allé d’un mémoire lourd de sens pour la Ville de Montréal pour plusieurs aspects. Jugez-en par vous-mêmes en lisant les extraits qui suivent. (Note : les intertitres et les caractères gras sont de nous)
Lors des périodes d’information sur les projets actuellement à l’étude et sur d’autres projets en consultation publique dont le projet de transformation et d’occupation du site de l’ancien Séminaire de philosophie des Sulpiciens, sur le mont Royal, Héritage Montréal a eu confirmation que des définitions de la sorte n’existaient pas à la Ville de Montréal. Nous n’avons pas eu plus de succès en tentant de connaître quelles étaient les définitions de « revitalisation » ou de « requalification » qui permettaient à la Ville de Montréal ou au promoteur de proclamer qu’ils décrivaient objectivement les projets.

Héritage Montréal comprend que la Ville de Montréal fonde son action sur l’élaboration de mesures de gestion du patrimoine et qu’elle explore actuellement l’outil de l’énoncé de valeur patrimoniale pour aider à cette fin. Toutefois, force est de constater à la lecture de l’Énoncé de l’intérêt patrimonial de l’îlot Saint-Laurent (document 5.2 du site de la consultation sur le Quadrilatère Saint-Laurent, daté du 19 mai 2009) produit par un groupe de travail conjoint du Bureau du patrimoine de la Ville de Montréal, de l’arrondissement de Ville-Marie et du ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine, qu’on en est encore aux expériences pionnières dans le domaine. Aussi, il convient de noter que cet énoncé a été produit deux semaines après le vote du Conseil municipal demandant la tenue de la présente consultation, le 28 avril. Nous notons aussi que les avis du Conseil du patrimoine de Montréal pour les deux projets datent du 14 avril, soit avant la nouvelle version du Quadrilatère Saint-Laurent datée du 5 mai.

C’est donc dire que des décisions très conséquentes sont prises dans un secteur d’intérêt patrimonial reconnu sur la base de documents inexistants ou quasi-expérimentaux. Nous notons ainsi que des documents présentant un concept révisé d’aménagement du projet sont daté du 1er mai, eux aussi après la tenue du vote au Conseil municipal ce qui accentue la perception de bousculade dans le traitement d’un dossier touchant un lieu patrimonial qui attend depuis 25 ans qu’on s’attarde à un véritable projet de conservation et de mise en valeur. Héritage Montréal voit donc un problème profond émerger avec ce dossier quant à la qualité du processus d’élaboration et d’évaluation du projet en ce sens qu’il verse le fardeau de la preuve dans l’a postériori et ce, malgré la production d’études patrimoniales dont la méthodologie fondée sur des pointages laisse à désirer. Cette situation nous apparaît néfaste à l’élaboration et la réalisation de bons projets, ici comme ailleurs. (Héritage Montréal, p. 7)

Il s’agit de reconnaître qu’il y a une capacité limite du patrimoine à accommoder des visions de développement sans perdre le sens et la valeur sociale, culturelle ou identitaire qu’on lui reconnaît. Autrement, on en arrive à des projets qui ne satisfont que des intérêts privés au détriment de l’intérêt collectif porté par l’espace urbain. (Héritage Montréal, p. 7-8)

Cet ensemble patrimonial porte donc les séquelles de l’indifférence des spéculateurs, de l’action des démolisseurs ou de la négligence des décideurs. Par contre, il a su résister à ces épreuves et à cet oubli pour demeurer un lieu incontestablement chargé d’une mémoire urbaine que son bâti, tout balafré et éclopé qu’il soit, sait encore porter et raconter. (Héritage Montréal, p. 9)

Sur le façadisme dénoncé par plusieurs architectes
La série de bâtiments commerciaux avec leurs façades de maçonnerie donnant sur Saint-Laurent ou sur Clark et leurs rez-de-chaussée ouverts et, pour plusieurs, leurs rez-de-chaussée traversants pour faire un pont entre ces deux rues forment une collection intéressante et éloquente couvrant le demi siècle entre 1980 et 1940. Leur conservation pose la question du façadisme comme mode de résolution de l’enjeu patrimonial dans la revitalisation de secteurs anciens. Généralement rejeté comme pratique de conservation, le façadisme est d’autant plus critiquable qu’il sert souvent de geste expiatoire pour des projets surdimensionnés ou conçus sans véritable prise en compte de la personnalité individuelle des bâtiments façadisés. (Héritage Montréal, p. 9)

Sur la pertinence et la recevabilité du projet
Héritage Montréal partage le principe de revitaliser ce secteur du boulevard Saint-Laurent et souhaite qu’on en arrive à de véritables résultats en ce sens, fondés sur une définition, des objectifs et des échéanciers clairs pour cette revitalisation. Au-delà de cette pertinence générale, nous restons incertains quant à la capacité réelle du projet proposé de réaliser cette promesse dans son expression actuelle – nature, envergure et
architecture dont on comprend du revirement rapide démontré par l’apparition d’une version révisée, qu’elle est en évolution. (Héritage Montréal, pp. 10-11)

Sur la prise en compte du patrimoine et du contexte urbain
Héritage Montréal se préoccupe de voir les questions de patrimoine et de contexte urbain réduites à la conservation de certaines façades avec un recul pour atténuer l’impact d’un choc trop brutal entre le volume proposé et le boulevard. Une telle solution ne nous semble pas être à la hauteur du défi d’architecture que pose un tel site. Il nous semble que des leçons devraient être tirées de projets comme ceux de la Maison Alcan ou du Centre de Commerce mondial.

Au plan urbanistique, nous nous préoccupons de l’impact du projet sur l’« écosystème » du centre-ville alors que le projet ne repose pas tant sur une réponse à de nouveaux besoins d’espaces locatifs qu’à un transfert provenant d’autres secteurs du centre-ville. Au plan de la composante commerciale, on peut apprécier l’ambition au titre du
« commerce responsable » mais s’inquiéter de l’envergure du projet qui constituerait un pôle supplémentaire sur une rue Sainte-Catherine déjà fort éprouvée. Qu’ils soient responsables ou non, les espaces commerciaux vacants et barricadés ne sont pas des signes intéressants pour Montréal et son centre-ville. (Héritage Montréal, pp. 11)

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